En France, l'étude des Compagnies, Sociétés, Confréries, Gildes ou Serments d'archers a souvent tenté la plume d'auteurs contemporains et beaucoup l'ont entreprise avec succès. Des écrivains consciencieux nous ont décrit l'organisation de ces Sociétés en même temps que celle des Arbalétriers et des Arquebusiers ; ils ont raconté leurs origines et leur brillant passé, réédité leurs règlements, énuméré et commenté les privilèges et les prérogatives dont elles jouissaient ; en un mot, ils ont mis en relief les côtés qui pouvaient présenter dans l'existence de ces associations quelque intérêt pour l'histoire nationale et celle des Corporations qui florissaient jadis aussi bien en France qu'en Belgique, mais aucun d'eux n'a jugé utile de nous dire les principes et les règles de l'art cultivé avec tant de soin et qui était pourtant le motif des groupements dont ils retraçaient les annales.
En résulte-t-il qu'aucun traité proprement dit sur la science de l'arc ait jamais été publié en France?
Jusqu'ici on était en droit de le supposer, car l'on ne pouvait citer comme tels les ouvrages de Vénerie écrits au xive siècle, celui du Roy Modus et de la Reine Ratio et les Déduits de la Chasse, de Gaston Phébus, qui l'un et l'autre contiennent simple-ent quelques vagues préceptes sur la manière de se servir de l'arc à la chasse. Tout autorisait à croire qu'en Angleterre seule-ment on avait pris le souci de traiter complètement ce sujet. D'une part, Gaston Phébus, en effet, avouant son incompétence, faisait cette déclaration : "Des arcs, ne scai-je pas trop mais qui en voudra savoir qu'il aille en Angleterre car c'est leur droit métier"; et au siècle dernier, Magné de Marolles, dans son livre sur la Chasse au fusil, en signalant, à l'occasion des armes qui ont précédé l'invention des armes à feu, les traités anglais qu'il connaissait sur l'exercice de l'arc, ajoutait : "Je ne crois pas qu'on ait écrit ex-professo sur ce sujet en aucune autre langue". D'autre part, les consciencieuses recherches et les importants travaux faits par les auteurs de la Grande-Bretagne avaient abouti à cette conclusion, qu'on devait considérer le Toxophilus de Roger Ascham comme le premier ouvrage de cette sorte.
Pourtant, il faut revenir sur cette opinion et l'on peut dire maintenant, grâce à une découverte déjà vieille de quelques années, mais passée inaperçue, qu'avant Ascham un auteur français a publié un livre sur la science du tir. On en trouve la preuve dans une plaquette publiée à Toulouse en 1874, sous le titre Un livre perdu un mot retrouvé, dans laquelle le Dr Desbarreaux Bernard rendait compte de la découverte qu'il venait de faire des débris d'un livre du XVe siècle. Ces débris comprenaient trois ou quatre feuillets parmi lesquels le titre et la table. Or le titre portait L'art d'Archerie et sur le dernier feuillet se voyait la marque du célèbre imprimeur Michel Lenoir, mort en 1520.