Après de longues et minutieuses investigations, le Dr Desbarreaux put se convaincre que cet ouvrage n'avait jamais été cité et que nulle part on n'en rencontrait d'exemplaire. Nos recherches personnelles à ce sujet sont restées également infructueuses; mais nous avons la satisfaction d'apprendre aux amateurs d'Archerie, aussi bien qu'à ceux qui peuvent déplorer la disparition d'un livre ancien quel qu'il soit, qu'un distingué bibliophile, M. Henri Gallice, a complété la découverte du Dr Desbarreaux. Il se trouvait possesseur depuis quelques années, d'un manuscrit gothique qui avait figuré à une vente du baron Pichon, en 1869, et portait comme titre : Cy sensuyt ung petit et beau traittéé enseignant la fachon de tirer à l'arc de main, faict et composé par ung qui point ne se nomme à la requeste de plusieurs qui désir avoient d'y apprendre; or, il a tout récemment constaté, en le comparant avec les fragments de texte qu'avait reproduits, dans sa brochure, le Dr Desbarreaux, que ce manuscrit n'était autre que celui du livre perdu.
Qu'il nous soit permis d'espérer que M. Henri Gallice, auquel on doit déjà la réimpression d'ouvrages de Vénerie devenus introuvables, se décidera quelque jour à publier le Traité d'Archerie si heureusement tombé entre ses mains.
La disparition déjà ancienne du livre en question permet de supposer que les principes qu'il contenait n'ont servi qu'à un nombre restreint de générations; or, comme on ne peut trouver, à part quelques conseils pratiques insérés, il y a peu d'années dans un journal spécial[3] , aucun traité, manuel, théorie ou méthode publié en français sur l'art de tirer à l'arc, il faut en conclure que nos tireurs se sont, depuis fort longtemps, contentés des conseils oraux des anciens pour s'initier aux secrets de cette science dans laquelle une longue pratique leur a permis de se perfectionner.
C'est encore là un mérite dont il faut tenir compte à nos Archers, car d'ordinaire les débutants, privés pour une raison ou une autre des conseils de gens expérimentés et ne pouvant y suppléer en consultant une tradition écrite, sont découragés dès leurs premières tentatives et renoncent à poursuivre leurs études.
"Pour former des archers, disait Végèce, auteur militaire du IVe siècle, en citant un ouvrage de Caton qui n'est pas parvenu jusqu'à nous, &emdash; il faut d'habiles éducateurs qui puissent leur enseigner à tenir leur arc avec méthode, à le tirer avec force, à bien fixer leur main gauche, à diriger leur main droite ration-nellement, enfin à accorder également leur œil et leur jugement pour atteindre le but à frapper.[4]"
Quoi qu'il en soit, l'exercice de l'arc constitue encore, dans l'état actuel de l'Archerie, un des jeux d'adresse les plus attachants; il a en outre le rare mérite d'être accessible à tous.
La facilité qu'offre l'établissement d'un tir dans un parc, dans un champ, sur une plage, dans une cour, le peu de frais qu'en-traîne l'achat d'un arc et de quelques flèches justifie cette affirmation.
Le reproche qu'on ne songe pas à faire à tant d'autres jeux et que l'on fait parfois volontiers à celui-ci en l'accusant de ne pas avoir d'utilité pratique est aussi mal fondé que possible.