I
Les Gaulois, les Saxons, les Germains et les Francs employaient l'arc à la chasse alors qu'ils dédaignaient encore de s'en servir à la guerre.
Strabon et Pline ont parlé de la chasse des Gaulois; au dire de ces auteurs, ils empoisonnaient leurs flèches avec le suc de l'ellébore et, à la condition d'enlever avec soin la partie touchée par le trait, ils pouvaient sans danger se nourrir de la chair des animaux ainsi abattus[2].
Les Espagnols ont longtemps, sans plus d'inconvénient, em-ployé des moyens analogues pour s'assurer la possession du gibier blessé et on cite des peuplades sauvages qui en usent de même encore de nos jours.
Théodoric, roi des Visigoths de Toulouse, mort en 466, se servait de l'arc avec une adresse remarquable.
Un de ses contemporains, Sidoine-Apollinaire, en a donné l'assurance dans une description qui vaut la peine d'être rapportée.
« S'il part pour la chasse, écrivait cet auteur, il juge au-dessous de la dignité royale d'attacher un arc à son côté ; mais pendant la chasse, lui montre-t-on, ou le hasard offre-t-il à sa vue, un oiseau ou une bête fauve, il tend la main en arrière ; un serviteur y place un arc dont la corde est flottante, car autant il paraîtrait peu digne au roi de porter un arc dans un étui, autant il lui semblerait efféminé de le recevoir tendu. L'ayant pris, il le tend en faisant plier les deux extrémités, ou en appuyant un des bouts contre son talon et en suivant du doigt la corde jusqu'au nœud. Aussitôt il prend la flèche, encoche et tire. Souvent, au moment de tirer, il vous demande de lui désigner ce que vous désirez qu'il frappe. Vous choisissez ce qu'il doit atteindre, il atteint ce que vous avez choisi et, s'il y a méprise, ce sera plutôt de la part de l'indicateur que du tireur[3]. »
Les Francs, eux aussi, comptaient parmi leurs chefs d'adroits chasseurs à l'arc et c'est, dit-on, avec cette arme à la main que Clovis parcourait la forêt de Cuise (forêt de Compiègne).
« Les rois et les empereurs de la race carlovingienne, notamment Charlemagne et Louis le Débonnaire chassaient également avec l'arc et les flèches[4]. »
Charlemagne, parmi les officiers de sa vénerie, en avait un certain nombre spécialement chargés de l'organisation de la chasse à tir ; on les appelait bersarii.
Ce nom provenait, si l'on en croit Du Cange[5], de bersa, mot de basse latinité qui aurait signifié « lieu fermé » ou « parc ». Il faudrait en conclure qu'on désigna sous le nom de bersarii ou bersaires les gardes des parcs de chasse, comme on nomma plus tard garesniers ceux qui furent chargés de la surveillance des garennes.
Mais cette étymologie est loin d'être satisfaisante et si Du Cange a réellement rencontré le mot bersa, il lui donne en tout cas une signification toute gratuite et qu'il ne justifie par l'appui d'aucun texte précis.
Qu'il nous suffise de dire que le mot allemand « birsen » qui devint « pirsen » et « pürschen » signifiait tirer à l'arc.
Nous n'avons pas à chercher si le terme allemand vient du terme latin ou réciproquement, toujours est-il que les Français employèrent l'expression berser ou bercer pour dire tirer à l'arc et l'on en fit bersailler et bersauder qui eut la même signification, puis bersault et bersail, pour exprimer le but du tireur à l'arc[6].
Enfin ajoutons que le mot « bersagliere » est resté en Italie le terme employé pour dire tirer; d'où « bersaglieri », tirailleurs et « bersaglio », cible.