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L'Arc à la Chasse
Part 3 de 10

Cette digression n'a pour but que d'établir l'origine d'un terme d'archerie encore employé de nos jours et que nous retrouverons au chapitre consacré au jeu de l'arc dans l'expression « le Tir aux Berceaux ».

Il semble que sous Charlemagne et ses successeurs, la chasse à bercer ait joui encore longtemps d'une certaine faveur.

Le clergé lui-même, au VIIIe siècle, malgré les prohibitions ecclésiastiques et les défenses réitérées des souverains, s'y distingue de façon particulière, notamment en la personne d'un abbé de Saint-Wast d'Arras, nommé Guido[7], qui excelle à tirer de l'arc et atteint les oiseaux au vol.

Les dames de leur côté ne dédaignent point d'aller berser au bois, ainsi que le témoigne une charte de 1240[8], par laquelle Anor de Saint-Valery, épouse de Henry de Sully, est autorisée à tirer de l'arc dans les forêts de ses domaines. Quelquefois, on les voit, pour satisfaire en même temps à leur penchant pour la fauconnerie, tirer, dans les haies, des merles que leur épervier tient fascinés et immobiles de frayeur[9].

Enfin, de leur côté aussi, malgré leur vive prédilection pour la chasse à forcer, autrement dit la chasse à courre, les souverains, princes et seigneurs ne paraissent point avoir toujours dédaigné l'arc, car il n'est pas de vieille chronique, avant le XIe siècle, qui ne nous montre cette arme entre les mains des personnages les plus importants.

Dans un chant populaire de la Bretagne, on voit le chef breton Noménoé, contemporain de Charles le Chauve, revenir au logis « précédé de ses grands chiens folâtres, son arc à la main et un sanglier sur l'épaule » au moment où un vieux père de famille vient lui demander de tirer vengeance des Francs qui ont traîtreusement décapité son fils. Noménoé jure « par la flèche qui a percé le sanglier » de laver ce crime dans le sang des assassins[10].

Les chants héroïques de la vieille Germanie, en particulier, le poème fameux des Niebelungen, nous montrant les héros burgundes ou Scandinaves se livrer à la chasse des sangliers et des ours, les représentent armés de l'arc « et du carquois couvert de peau de panthère et rempli de flèches garnies d'or dont le fer est large comme la main. « Ils nous disent que l'on tendait l'arc de Siegfried avec un cric lorsqu'il ne procédait pas lui-même à cette opération, ce qui n'implique pas, comme on pourrait le croire, que le héros se servît d'une arbalète, mais bien que son arc était si puissant que lui seul, grâce à sa force exceptionnelle, pouvait parvenir à le tendre ; tels Ulysse et son arc.

Entre tous, ce sont encore nos vieux romanciers normands qui nous fournissent le plus d'indications sur la chasse avec l'arc, car les descendants de Rollon semblent s'y être distingués plus spécialement que les princes des autres nations.

Robert Wace dans le Roman de Rou, que nous aurons souvent à citer car il offre une mine inépuisable de renseignements sur les coutumes du XIe siècle, nous apprend que Richard sans Peur

... Sut cointement et berser et vener,

autrement dit, était également versé dans la chasse à l'arc et dans la science de la vénerie.

Les descendants de Guillaume le Conquérant ne furent pas moins adroits à berser et plusieurs d'entre eux furent même victimes de leur passion pour ce genre de chasse.

La « New Forest », théâtre de leurs exploits, paraît, comme le dit Hansard[11], leur avoir été particulièrement fatale.

D'après cet auteur, Richard, fils aîné de Guillaume le Conquérant, y reçut une flèche dans le cœur.

On sait d'autre part, qu'un fils de Robert de Normandie, également nommé Richard, mourut à la chasse dans la même forêt, frappé d'un trait égaré et enfin, que deux mois après cet accident, son oncle Guillaume le Roux, second fils du Conquérant, succombait de la même façon « en bersant cerfs et biches dans la Nove forest » en l'année 1100[12].

Guillaume Tirel, comte de Foix, réputé adroit tireur et que pour cette raison Guillaume le Roux avait attaché à sa personne, fut accusé de cet homicide accidentel ou volontaire; pourtant le frère puîné de Guillaume, qui devint roi d'Angleterre sous le nom de Henri, fut aussi longtemps soupçonné d'être l'auteur de ce meurtre.